Orange : Analyse du rapport CNPS, thème 1 - Insécurité de la situation de travail
15 mai 2025

Qu'est ce que l'insécurité de la situation au travail ?
Elle recouvre un ensemble de sentiments et de projections du salarié dans sa situation de travail. Cela peut être la crainte de perdre son poste, son emploi, mais aussi la crainte de ne pas se retrouver dans la stratégie de l'entreprise, que ses compétences deviennent caduques. C'est une crainte immédiate, qui peut aussi être à moyen terme sur l'évolution de ses compétences par rapport à la stratégie de l'entreprise.
"La situation de l'entreprise avec des réorganisations, des Plans de Départ Volontaire (PDV), des restructurations (offshoring) & le Temps Partiel Senior (TPS), a eu beaucoup d'impact sur l'organisation et les structures de l'entreprise : il y a un délitement complet de nos moyens, de nos compétences, de nos ressources et de nos possibilités. La situation est vraiment très compliquée pour les opérationnels qui tiennent à bout de bras le socle de l'entreprise."
"Il serait temps d'accompagner les salariés sur les différents métiers qu'Orange propose. A ce jour on ne nous parle que de réductions de coûts et de fermeture de boutiques et de services, que va-t-on devenir ?"

Depuis de nombreuses années l’entreprise multiplie les réorganisations et les déménagements. Elles se suivent à un rythme accru, tous les 18 ou 24 mois en moyenne. Elles sont la première cause de l'insécurité de la situation de travail. Elles ont un effet cumulatif qui augmente le sentiment d'insécurité.
L’impact sur les salariés est toujours plus important en termes de Risque PsychoSociaux (RPS) et d’insécurité de la situation au travail. Même pour les salariés qui considèrent avoir bien vécu ces évènements, s’ils sont répétitifs, le souhait de quitter l’entreprise augmente. La communication fait souvent défaut avec des informations incomplètes ou données au dernier moment. L’accompagnement est souvent restreint ou insuffisant : le manque d’effectif des RH et de la prévention, qui manquent aussi de visibilité, se fait sentir.
Les réorganisations et les déménagements doivent donc être réduits, avec la mise en place d’une stratégie à moyen et long terme qui doit tenir compte de l’humain. Ces actions doivent être menées progressivement dans le temps, avec la participation effective de la chaine managériale et des salariés.
"Compression du personnel par retraite et TPS sans recrutement depuis plusieurs années, sans aucune anticipation sur le sujet, avec une hypocrite annonce d'anticipation une fois le mal fait, perte de compétences à tout va, difficulté à travailler d'une manière fluide, le travail est devenu fade et on nous raconte depuis 20 ans qu'avec la transformation faut se serrer la ceinture, donc c'est plus de travail et moins de reconnaissance."
Les suppressions de postes, par le non remplacement des départs, sont importants. Orange a supprimé 20% de ses effectifs en France en 3 ans. Le travail à faire ne partant pas en retraite ou en TPS, une grande partie est sous-traitée, délocalisée. La direction automatise ce qui ne l'est pas déjà et attend beaucoup de l'Intelligence Artificielle (IA). Ce sont des changements importants.

D'une part, ce sont les parties les moins compliquées du travail qui sont sous-traitées… il reste donc que ce qui est le plus compliqué. D'autre part cela pose plus fort le problème pour les salariés de se projeter dans l'avenir, dans un environnement changeant, avec des évolutions technologiques importantes (IA par exemple). L'adaptabilité à ces changements est un enjeu primordial pour les salariés. 59% des répondants estiment que la formation qu'on leur propose est de l'information plutôt que de la formation. Celles qui sont proposées sont jugées par ceux qui en bénéficient comme peu en lien avec les transformations réelles des métiers, donc ne correspondant pas vraiment à un besoin en termes professionnels. Cela accentue le sentiment d'insécurité sur l'avenir.
"L'incertitude quant à l'avenir de la branche Innovation constitue une source de stress. De nombreuses rumeurs existent sur un prochain Plan de départ Volontaire et on observe que nos collègues partis en TPS ne sont pas remplacés et qu'aucune embauche ne se profile. Alors que la situation financière du groupe est bonne, comment expliquer les conditions de travail qui se dégradent à Innovation ? Nous ne pouvons plus effectuer de déplacements pour des raisons de coûts, ni investir dans du matériel. Cette incertitude génère une inquiétude généralisée chez les salariés."

Le rapport du Comité National de Prévention du Stress (CNPS) 2024 met en évidence un cercle vicieux entre insécurité du travail et facteur de reconnaissance. La reconnaissance salariale est le premier facteur qui est cité par les répondants, qui estiment à 68% que leur rémunération n'est pas en adéquation avec leurs compétences et surtout avec les efforts qu'ils fournissent dans leur activité. Et seulement un gros tiers 35%, jugent satisfaisantes les perspectives de promotion. Pour rappel, 20 000 salariés, soit plus du tiers des salariés d'Orange France, n'ont pas eu de promotion depuis plus de 10 ans.
"La rémunération n'est pas à la hauteur du travail fourni. L'entreprise ne sait pas revaloriser les salaires par des augmentations individuelles à la hauteur. Les augmentations collectives sont trop faibles par rapport à l'augmentation du bénéfice de l'entreprise et du SMIC qui nous rattrape"
Pour la CGT, il faut agir à la source de ce sentiment d'inquiétude et d'insécurité. Et donc stabiliser l'organisation. Cela ne peut se faire qu'en arrêtant les suppressions d'emplois et en remplaçant les départs pour pouvoir assurer le travail en interne. Pourquoi ? Car c'est ce qui permet de garder les compétences importantes des salariés. Et d'assurer de vraies formations, adaptées à la réalité des nos besoins, et même un peu au-delà, ce qui permet de donner une couche permettant à tous les salariés de comprendre les besoins de ses collègues.
Il faut aussi reconnaître les compétences et qualifications acquises, encore plus dans notre environnement en rapide évolution technologique. Il faut pour cela des promotions en nombres suffisants. Il faut aussi des salaires qui évoluent pour ne pas perdre de pouvoir d'achat. Il faut aussi une plus grande concertation avec les salariés à propos de l'organisation du travail, du contenu du travail.